Je te vois
De la fenêtre de son cabinet de psychanalyste, Éva contemple l’agitation mystérieuse qui règne sur le chantier de l’autre côté de sa rue. Elle est fascinée par ces hommes bottés, casqués et casaqués de jaune fluo qui s’agitent sans raison évidente, à l’exception du grutier qui, du haut de son engin surnaturel, manipule des charges considérables avec une délicatesse et une précision de couturière. Éva regarde les ouvriers et les ouvriers regardent Éva, surtout Louis, le chef de chantier, et Pedro, le grutier. Or, à force de regarder, on finit par voir des choses. C’est ainsi qu’Éva assiste au passage à tabac d’un ouvrier par des malfrats qu’elle ne peut identifier, mais qui lui font savoir cruellement qu’il vaudrait mieux pour elle qu’elle n’ait rien vu du tout. Cet incident provoque des relations entre deux mondes qui n’auraient jamais dû se croiser. On se rencontre, on se parle. La vie de chacun des personnages va s’en trouver profondément bouleversée. Qui aurait pu penser que Louis, le veuf, l’inconsolable chef de chantier, éprouverait le besoin de se lancer dans une psychanalyse et qu’Éva se trouverait attirée par ce nouveau patient d’une manière que la déontologie réprouve ? Qui aurait pu croire que derrière le ballet si bien réglé des ouvriers du bâtiment se dissimulent la misère, l’exploitation, les haines raciales, les faiblesses et les désarrois les plus tragiques ? Un roman choral contemporain, douloureux et sensible.
Béatrice Shalit
Béatrice Shalit est née à New York. Après des études en France et aux États-Unis, elle devient productrice, scénariste et réalisatrice de télévision. Elle a par ailleurs publié une dizaine de romans dont, aux Éditions Bernard Barrault, L'Année de Louise (1984), Le Plus Jeune Frère (1986), Lisa, Lisa (1990), et, chez Julliard, Famille et autres supplices (2000), Ne m'appelez plus Varsovie (2003), Merci d'être venu (2006) et Qui veut tuer Rosa Hoffmann ? (2011).