La colonie du nouveau monde
Elle était Tiyi, mère des princesses Néfertiti et Meritaton, enceinte d’un nouvel enfant du Soleil Aton.Un an plus tôt, venant de la Guadeloupe en passant par le Venezuela, ils avaient échoué dans la petite ville de Santa Marta, sur la côte caraïbe de la Colombie, avec Mandjet et Mesketet, leurs derniers fidèles.Ils n’avaient trouvé là que la misère et le mépris. Par dérision, les habitants de Santa Marta avaient appelé le petit groupe des adorateurs du Soleil «la colonie du nouveau monde». Aton avait continué ses dévotions, mais Rê, le Soleil, était devenu sourd à ses appels. Ils voulaient retourner en Egypte, le berceau de la religion première, mais les fonds manquaient et le bateau qui devait cingler vers la Terre promise n’avait pas pris la mer.C’était ici, à La Ceja, sur cet hectare de terre aride, qu’allait s’achever le rêve sincère de fonder une religion nouvelle. C’était ici qu’ils allaient tous périr, dans la cupidité, la haine et la folie. Abandonnés des hommes. Abandonnés de Dieu.
Maryse Conde
Maryse Condé est née en Guadeloupe. Elle a étudié à Paris, avant de vivre en Afrique, d’où elle a tiré l’inspiration pour son best-seller : Ségou (Robert Laffont, 1985). Elle compte actuellement plus d’une douzaine de romans à son actif, dont Moi, Tituba, sorcière (grand prix littéraire de la Femme, 1986), La Vie scélérate (prix Anaïs-Ségalas de l’Académie française, 1988), Le Cœur à rire et à pleurer (prix Marguerite-Yourcenar, 1999). Elle enseigne actuellement la littérature à l’université de Columbia (New York).En 1993, Maryse Condé a été la première femme à recevoir, pour l’ensemble de son œuvre, le prix Putterbaugh décerné aux Etats-Unis à un écrivain de langue française.