Récits d’amour et de chevalerie au Moyen Age
Compagnon indispensable de La Légende arthurienne, ce volume réunit douze récits inédits pour former un ensemble unique de narrations médiévales. Écrits du XIIe au XVe siècle, ces textes sont présentés, attachés à la tradition qui leur est propre : l’Antiquité, le monde arthurien, le folklore. Les aventures des amants, la naissance de leur sentiment, les angoisses de la passion, les tournois, les quêtes et les initiations chevaleresques… À travers ces histoires d’amour où la prouesse et la recherche de l’aventure sont essentielles, on découvre aussi le goût des auditeurs et des lecteurs des temps anciens ; le burlesque, le comique et parfois même le grivois n’en sont pas absents.
» Par Dieu, dame, aimez-moi ! Je vous y invite de bonne foi car je ne connais pas homme qui vive qui soit capable autant que moi de vous servir avec loyauté et de vous aimer d’un amour parfait, noble reine. Je me place en votre seigneurie, d’un coeur royal et sans regrets, tout dévoué à votre plaisir.
– Et moi, fait-elle, je vous accepte comme ami et en toute loyauté je vous donne et mon coeur et mon amour. Certes, c’est un grand honneur que je vous fais puisque je n’ai jamais voulu écouter un homme qui me requît d’amour ; mais pour vous, je dois dire et faire tout ce qui peut vous être agréable, noble et cher seigneur, parce que, grâce à vous, j’ai retrouvé mon honneur après le grave outrage dont m’avait accablée le perfide et ignoble sénéchal que je vous ai vu forcer à se rétracter. Dès ce moment-là, vous avez eu mon coeur et je n’ai cessé depuis de vous aimer en raison de votre vaillance en ma faveur. Ainsi, j’ai souvent pensé depuis que si je devais jamais aimer de mon vivant, ce serait vous à qui je donnerais mon amour. Mon amour que j’ai gardé pour vous très fidèlement jusqu’à ce jour, je vous le confie ici même. Je n’en ai jamais fait part à personne sauf à vous que je tiens en grande affection et dont je fais mon chevalier. C’est pourquoi je ne vous ferai pas languir ni ne tricherai comme le font de nombreuses dames déloyales à l’égard de leurs amis. Au contraire, vous jouirez de moi au point que cette nuit même je me coucherai nue dans vos bras, mon ami. »
Joufroi de Poitiers, Le Moment de l’aveu