Que le meilleur gagne !
Au tir à l’arc, désirer atteindre la cible, c’est désirer ce qu’on n’a pas.
Désirer l’avenir, c’est ce qu’on appelle une espérance, donc une peur. Comme le dit Spinoza, « il n’y a pas d’espoir sans crainte, ni de crainte sans espoir » … Désirer ce que l’on n’a pas, c’est se séparer du bonheur. Le sage ne veut pas atteindre la cible mais seulement la viser bien, et c’est ainsi, selon les textes zen, qu’il atteint un pou en plein cœur.
Au-delà des préceptes de la philosophie antique, appliqués au sport contemporain, André Comte-Sponville traite dans ce texte des vertus et des limites du sport, ainsi que des valeurs qu’il peut incarner. Le sport a d’exemplaire la capacité de réconcilier l’idéal démocratique, qui suppose l’égalité de tous, avec l’idéal aristocratique, qui suppose au contraire leur inégalité selon le principe : « Que le meilleur gagne ! »
Car si nous sommes tous égaux en droits et en dignité, nous ne le sommes ni en fait et ni en valeur. C’est ce qui distingue la démocratie du nihilisme ; et le sport, d’un simple divertissement.
André Comte-Sponville
André Comte-Sponville est l’un des philosophes français les plus lus et les plus traduits dans le monde. Il est l’auteur d’une trentaine d’ouvrages, dont le célèbre Petit Traité des grandes vertus.