En première ligne dans la lutte contre le Covid 19, le professeur Éric Caumes ne contente pas de livrer son propre témoignage sur le combat qu’il a mené avec ses équipes. Il brosse un tableau d’ensemble de la situation sanitaire de notre pays, de ses urgences et de sa capacité à faire face à un rebond de l’épidémie comme à l’apparition de nouvelles pandémies.

« Urgence sanitaire est un témoignage sur les premiers mois de l’épidémie de covid et la réponse française à cette première pandémie du XXIe siècle.

Ce témoignage n’est pas le fait du hasard. Simplement, je me suis retrouvé en première ligne du covid car je dirige le service des maladies infectieuses de l’hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière. Or cet hôpital est un des deux seuls établissements de Santé de Référence, c’est-à-dire habilité à accueillir les malades atteints d’une infection émergente hautement contagieuse comme l’est le covid, à Paris. J’y avais déjà vécu les épidémies successives de sida, de grippes et les deux précédentes infections à coronavirus (MERS, SRAS) qui ont émaillé les quatre dernières décennies. Et comme l’Ile de France a été, au même titre que la région grand-est, lourdement impactée par le covid et ses prémisses, nous avons été concernés dès la fin janvier 2020. C’est à ce titre là que j’ai dû d’être interrogé par nos gouvernants, et beaucoup sollicité par les médias du fait de mon rôle possible de lanceur d’alerte lors de la visite présidentielle du 27 février, retransmise en direct sur BFM-TV. Cette épidémie sera aussi médiatique.

Ce témoignage se veut le plus indépendant possible. Et je revendique cette indépendance. Je n’ai pas de lien d’intérêt avec les laboratoires pharmaceutiques impliqués dans le covid ni dans l’infection VIH. Je préfère le préciser car le même laboratoire se trouve être impliqué dans les deux domaines. Par ailleurs nous verrons que les personnes d’influence dans le domaine du covid venaient pour beaucoup du monde de l’infection VIH, je me demande d’ailleurs toujours pourquoi aujourd’hui. Je ne suis pas non plus proches des milieux politiques, ni des cercles d’influence classiques, et je n’ai d’ailleurs appartenu à aucune des structures décisionnelles covidiennes si ce n’est au niveau de mon hôpital. Je n’ai d’ailleurs fait partie d’aucun de ces trop nombreux comités Théodule auprès du gouvernement. Urgence sanitiare est une approche historique car une épidémie est indissociable du contexte historique dans lequel elles s’épanouissent. Pour le covid, la destruction des services publics hospitaliers qui étaient en cours, et la disparition d’une culture française de la santé publique ont vraiment compliqué la réponse à cette épidémie. On en avait oublié jusqu’aux masques ce qui, pour une infection à transmission respiratoire, est bien étrange Je ne crois pas que les épidémies surviennent par hasard, au hasard.